Quel est le dernier jeu que vous avez fini ?

J'avais dit il y a quelque temps que Decarnation m'intéressait, je me le suis procuré, y est joué et l'ai fini. Donc un petit avis, vite fait.

C'est développé par le studio Français Atelier QDB, ça coûte une quinzaine d'euros sur PC et Switch, pour une durée de vie d'environ 7h.

Hormis ce qui est en balise, je ne dévoile principalement que l'acte I (sur six) du jeu, qui sert à mettre en place le corps de l'histoire.

Le pitch :

Paris, 1989, Gloria arrive sur la trentaine.
Cet âge semble passer un genre de cap, où elle n'est plus "jeune" et la vie commence à lui faire comprendre : Danseuse de cabaret, son patron cherche à l'évincer du devant de la scène, sa relation avec sa petite amie (nettement plus jeune qu'elle) est instable, sa mère lui fait des critiques etc...
Tout commence par une scène où elle pose nue pour un sculpteur. Au moment où elle se rend dans le musée pour voir le résultat, elle va être témoin d'une scène qui va la choquer et la mettre dans un grand état de stress.

Je ne vais pas plus loin pour éviter de trop en dévoiler mais un élément perturbateur arrive assez tôt et sera le moteur de l'intrigue.

C'est quoi ?

On a affaire principalement à un jeu narratif, donc la team "si je voulais regardais un film... gneuh gneuh" peut retourner jouer à Mario Kart et se renseigner sur un jeu avant d'y jouer pour éviter de se plaindre qu'une oeuvre narrative cherche à lui raconter des trucs puis d'essayer dire ce que doit être un jeu vidéo à ceux qui le font.
Plus sérieusement oui, la vocation première du bouzin c'est de raconter une histoire : on lit et regarde beaucoup, on joue peu. Le choix d'en faire un jeu est néanmoins pertinent, pour des questions d'immersion principalement.

Il y a donc, quand même, quelques phases de gameplay. Qui en plus s'incorporent souvent assez bien aux moments qu'elles cherchent à marquer, comme des petites énigmes ou des mini-jeux de rythme (Gloria est danseuse je rappelle). Certaines de ces phases peuvent être un peu frustrantes (celles d'infiltration.. brrr) mais rien de bien méchant non plus.
Il y a également des petits moments d'exploration, où on bouge, on examine, on parle à des PNJ etc... Pour pouvoir trouver le trigger qui va nous faire progresser ou lire les commentaires de Gloria sur les différentes choses à observer.

C'est réussi ?

Quelque chose d'assez remarquable c'est qu'il arrive à mettre mal à l'aise en étant assez peu démonstratif, du moins dans les phases non-cauchemardesques (qui sont les plus efficaces à mon sens). En effet, on est plus en présence d'un jeu d'horreur psychologique que frontal.

À ce niveau j'ai trouvé le jeu assez éprouvant (dans le "bon" sens du terme), dû principalement à ce fameux événement que je m'apprête à spoil plus bas en balise et à son évolution. Cette évolution passe par plusieurs phases, qui vont nous permettent d'explorer la psyché de Gloria pour comprendre ses démons intérieurs et ses réactions face à ce danger.
En plus des inspirations assumées (David Lynch ou Satoshi Kon), le jeu m'a rappelé un film :

Les phases "cauchemardesques", elles, sont blindées de métaphores, ce qui les rend assez difficiles à interpréter par moment. Je suis incapable d'expliquer chaque élément qui les composent, même si je vois l'idée générale. Donc même si elles sont plus "visuelles" et qu'elles se permettent plus de folies sur ce point, elles n'en restent pas moins axées sur une horreur du même bord que les autres moments.

Le jeu aborde des thématiques matures, adultes, comme le temps qui passe et ses effets sur les corps (et donc la superficialité par extension) :

On retrouve d'ailleurs beaucoup d'éléments figurant des partie de corps humain dans les décors des "cauchemars" :

Ici des veines et artères

Là, un visage

Mais pas que, on a aussi l'obsession ou la solitude par exemple.

Clairement oui je trouve qu'il réussi globalement ce qu'il entreprend. Je n'ai même pas vraiment grand-chose à lui reprocher en réalité, mais il faut vraiment savoir dans quoi on met les pieds, on est à la limite du visual novel.

Les musiques

Elles participent beaucoup au malaise ambiant. On reconnaît facilement la patte d'Akira Yamaoka qui sort quelque chose à la fois sobre et efficace.

Mais le plus marquant, ce sont ces chansons Françaises, entêtantes et composées spécialement pour l'occasion, du groupe Fleur et Bleue, qui donnent une patine particulière au jeu.
Notamment celle-ci, qui est la chanson du trailer :

Ou elle, qu'on entend régulièrement :

Visuellement on a affaire à un pixel-art que je trouve assez magnifique avec une chouette DA :

On retrouve régulièrement les mêmes décors, mais c'est totalement voulu et pertinent avec le propos, ils changent, évoluent avec le temps (de jeu et de la diégèse).

Il y a de jolis plan bien composés :

Mais aussi bien détaillé, il y a eu pas mal de boulot :

Conclusion :

J'ai bien aimé, pas trouvé ça incroyable non plus mais c'est franchement réussi pour ma part.
Par contre c'est plus compliqué à recommander, il ne faut pas être allergique aux jeux essentiellement narratifs et à ce type d'horreur (on est très très loin de n'importe quel Resident Evil par exemple !).