[Jeu/Découverte] - TriMovies le Renouveau

De façon générale, très peu de films asiatiques s’exportent internationalement. Lorsqu’on évoque les films coréens dans notre petit pays on pense forcément aux plus grands succès tels que The Host ou Old Boy. Cette nouvelle vague de films coréens sombres donnent une image bien particulière à ce cinéma. Si vous voulez vous faire une idée de cet engouement, voici une petite compilation de films contemporains coréens.

Bien derrière cette surenchère d’humour noir, Sunny (prononcé Sseo-ni) se veut être une ode à la société et à la vie. M’enfin, ça, c’est simplement la première couverture car le film est empreint de nombreux messages politiques avec des paroles particulièrement dures.

J’en vois déjà certains hausser les sourcils. Il me semble important de vous expliquer dans quelles conditions Sunny est sorti dans les salles.

La Corée du Sud est beaucoup plus exigeante sur les restrictions d’âge lorsqu’un film sort au cinéma. Concrètement, il n’est pas rare de voir un film tout public en France être réservé aux 18 ans et plus en Corée. Dans Sunny, la violence et les injures n’ont pas plu au comité coréen. Pire, le film met en scène des jeunes filles ! M. Kang, le réalisateur, s’est senti particulièrement embêté (pour rester poli) lorsqu’on lui a annoncé que son film serait interdit aux mineurs.

Est-il si problématique de montrer aux jeunes un quotidien (harcèlement, violence, délinquance…) vécu par des personnes du même âge ? Or, ce n’est pas une polémique « nouvelle » dans le monde du cinéma. Les Etats-Unis ont connu un véritable tollé lors de la sortie de Blackboard Jungle en 1955 : c’est la première fois que la délinquance juvénile était montrée au grand jour sous des airs de musique rock !

Mais depuis Blackboard Jungle, les mœurs ont bien évolué. Pour en revenir à Sunny, il faut savoir que 10 minutes ont dû être tout simplement coupées du film pour bénéficier d’une sortie en salle qui n’assassinerait pas les revenus. La plupart le savent déjà mais il faut rappeler : un film interdit aux mineurs revient à un échec commercial. Ainsi, c’est cette version édulcorée qui a conquis le public, et que la majorité d’entre vous ont vue ! C’est simple, vous n’étiez même pas au courant qu’une autre version existait, n’est-ce pas ?

Sunny a été le 2e film le plus rentable de l’année en Corée. Ce succès incroyable a permis à la version Director’s Cut (rebonjour aux 10 minutes retirées à la va-vite) de faire son apparition en salle ! Interdite aux moins de 18 ans, cette version est plus dure, plus violente et montre en détail les difficultés éprouvées par les jeunes filles.

Si les intentions positives du réalisateurs sont accessibles dans la première version du film, la DC est capitale à la compréhension des problématiques sociales et politiques. La violence de la fin du film prend tout son sens au contraste de l’image colorée. On percute enfin ce qui est arrivé à ces femmes.

La culture coréenne nous dépasse totalement, et pourtant ce film a la force d’émouvoir. Pour une histoire loin des thrillers coréens les plus reconnus, ce film réussit étonnamment bien à nous impliquer dans son intrigue. Bien que certains pourraient trouver certains sujets abordés de façon simpliste (l’évolution de la romance) ou de manière improbable (scènes de rixe), c’est bien à ces moments-là que la photographie déborde de créativité. La place de la caméra au cœur des actrices, la mise en avant des émotions font qu’on est souvent ébloui par ce qui nous est offert. Le jeu d’acteur est tout particulièrement réussi aux moments opportuns.

Les seules inquiétudes sont bien celles du début. Les enjeux sont un peu flous, tout semble aller un peu trop vite et la culture coréenne crée une sorte de barrière trop visible. L’investissement nécessite un certain effort, mais cette gêne se dissipe vite.

Heureusement, cette montée en crescendo de la qualité avec un enchaînement de scènes osées (on aime ou on aime pas, mais cette révolution emballée à coups de baston entre ados en impose). On peut trouver ce contrôle de l’émotion abusif. Je fais référence à la vision de la cassette, première scène mettant directement en contact le passé avec le présent. Cette dernière partie du film donne lieu à une succession d’émotions qu’on accepte les bras grand ouverts. Le tout ponctué de musiques imposant un rythme rapide (et nostalgique), malgré les 2 h 15 de cette version DC, on ne s’ennuie pas.

Pour conclure, bien que la qualité du film ne soit pas constante, il est appréciable de voir qu’elle augmente au fil des minutes pour une fin particulièrement poignante. Personnellement, ce fut une très bonne expérience qui permet à la culture coréenne de s’épanouir tout en osant montrer des problèmes graves de société. Le montage et les transitions donnent ce pouvoir fantastique qui font que ce film ne sera pas oublié de si tôt.

On dit merci à sympho et si ce n’est pas déjà fait, allez voir la version DC !